Par Louis Maury
Le film de Christophe Honoré, mercredi en salles, permet à François Sagat d'effectuer ses débuts dans le cinéma classique. La star du porno gay y est crédible, tout en jouant intelligemment de sa plastique…
Le nouveau film de Christophe Honoré, Homme au bain, n'aurait jamais dû sortir au cinéma. Ce n'est pas un jugement de valeur, mais bien le destin qui attendait d'abord ce moyen-métrage, à deux doigts du film expérimental, réalisé dans le cadre d'une carte blanche avec le théâtre de Gennevilliers. Scénariste et réalisateur, Honoré voulait trouver l’équivalent cinématographique d'un tableau du même nom datant de 1884 signé Gustave Caillebotte, célèbre peintre de Gennevilliers, montrant un homme qui s’essuie le dos après son bain (voir ci-dessous).
À partir de cette inspiration, le cinéaste a souhaité réfléchir à l’intimité virile au cinéma. Donc acte. Christophe Honoré a du talent. Et le prouve depuis longtemps (17 fois Cécile Cassard, Tout contre Léo, Les Chansons d'amour…). Là, il fait une sorte de digression warholienne où François Sagat, serait son Joe Dallesandro. La star du porno gay sait intelligemment jouer de sa plastique et se prête depuis longtemps à différents travaux artistiques sur le corps.
Accueil acide
Une démarche subtile d'un acteur qui arrive parfaitement à rebondir sur la fascination qu'il suscite. Et ici, dans cette histoire où deux garçons se séparent, car ils s'aiment peut-être trop, il ne manque pas de présence. Sagat dégage même une fragilité touchante. Il est en tout cas bien plus crédible que dans le L.A. Zombie de Bruce LaBruce, œuvre gore tout à fait dispensable.
Présenté cet été au Festival de Locarno, grand rendez-vous des cinéphiles, Homme au bain a reçu un accueil très acide. Certains ont parlé «d'un mauvais rêve d’une Nouvelle Vague dépassée…». Critique injuste. Certes, le dernier film de Christophe Honoré n'est pas un film «touchant» comme le laisserait imaginer le fond de l'intrigue. C'est plutôt un drôle d'hybride qui hésite entre plusieurs genres. Et le spectateur ne sait plus trop où se placer.
Grâce à la notoriété d’Honoré, et à ses nombreux fidèles, Homme au bain devrait néanmoins rencontrer un public assez large. Qui sera sûrement désarçonné par son propos. Tant mieux: dans un cinéma français souvent timoré, où beaucoup de metteurs en scène creusent le même sillon, Honoré expérimente. Sa tentative n'est peut-être pas tout à fait concluante, mais elle a au moins le mérite d'avoir été osée!
Homme au bain, en salle mercredi 22 septembre.
La bande-annonce:
Photos: DR et Homme au bain, de Gustave Caillebotte.
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